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29 avril 2019

INTERVIEW - Mélissa Plaza : « La plupart des joueuses ont deux métiers » (1/2)

Ex-footballeuse professionnelle, conférencière, titulaire d’un doctorat, chroniqueuse, Mélissa Plaza possède plusieurs cordes à son arc. La jeune femme de 30 ans sortira dans quelques jours son livre « Pas pour les filles ? ». Un livre qui raconte son histoire mais également son point de vue sur la féminisation du football. Elle sera présente à Salon-de-Provence, le 12 mai lors de la troisième journée de la Sud Ladies Cup 2019. Rencontre avec une femme hyper active et habitée par un but : défendre la liberté individuelle et le bien vivre ensemble. 

Mélissa, pouvez-vous présenter votre carrière sportive en quelques mots ?

J’ai commencé le foot en club quand j’avais 8 ans, fait étrange le club avait une section féminine. Je jouais dans une équipe de filles mais dans un championnat de garçons. J’ai fait ma première année de sport-études à Tours, j’étais en troisième. J’ai ensuite fait toutes mes classes de sport-études à La Roche-sur-Yon, club dans lequel j’ai fait mes premiers pas en D1. J’étais alors âgée de 15 ans. Puis sont venues mes premières sélections en équipe de France U20 pour jouer la Coupe du Monde au Chili. Ensuite, j’ai rejoint Montpellier dans la foulée. J’ai signé mon premier contrat professionnel là-bas, c’était la première fois que le club était européen également. C’est là où j’ai connu vraiment le très haut niveau, j’y suis resté quatre années. Ensuite j’ai signé à Lyon pour deux ans et j’ai terminé ma carrière à Guingamp en 2016.

Que retenez-vous de cette carrière de joueuse professionnelle ?

Beaucoup de choses. De très bons souvenirs avec des titres et des sélections en équipe de France. Le dernier très bon souvenir, c’est quand on a été championnes olympiques universitaire en Corée du Sud, le plus beau souvenir de ma carrière. Il y a aussi des moins bons souvenirs avec des blessures à répétition, des sentiments de frustration avec les conditions qui étaient les nôtres à l’époque et qui le sont encore aujourd’hui pour certaines filles dans certains clubs. Globalement, je tire de cette carrière beaucoup d’enseignements pour la suite. Je m'en sers dans tout ce que je fais aujourd’hui, notamment à travers mes conférences pour transmettre des choses à celles et ceux qui ne sont pas forcément familiers avec ce milieu-là.

Comment analysez-vous le fait d’être joueuse de foot professionnelle en France ?

Alors, la première des choses à savoir, c’est le type de contrat que nous signons. Ce ne sont pas des contrats professionnels. On est rattachées à la Ligue amateur donc les contrats signés sont des contrats fédéraux comme les joueurs de National 1 Masculine par exemple. Les filles les plus chanceuses signent ces contrats, c’est-à-dire semi-pro, avec des montants corrects qui leur permettent de vivre chaque mois avec. Cependant, la majorité d’entre elles signe des contrats ridicules qui font office de mi-temps ou tiers temps mais qui en réalité représentent un temps plein. La plupart d’entre elles ne signent pas de contrats et sont défrayées ou payées en pot-de-vin voire pas payées du tout. La réalité actuelle, c’est celle-là. Il y a une minorité de clubs et une minorité de joueuses qui vivent du football. Soit elles exercent une activité professionnelle à côté, soit elles font des études. Mais c’est un leurre que d’imaginer que le football féminin a évolué à tel point que toutes les joueuses soient professionnelles.  

Que faut-il changer ?

Tant qu’on n’objectivera pas la situation, on ne sera pas en mesure de bouger les choses. Car les gens n’ont pas conscience des salaires entre les différentes joueuses dans le championnat mais également de la précarité de la plupart d’entre elles. La majorité des joueuses ont deux métiers, c’est à dire le foot et un métier d’appoint et elles ont du mal à arriver au SMIC mensuellement. C’est dramatique pour elles mais c’est dramatique aussi pour l’attractivité du championnat de France. Des filles qui bossent huit heures par jour et qui s’entrainent trois ou quatre fois par semaine quand elles vont jouer à Lyon, forcément elles prennent une pilule. On ne peut pas leur demander mieux que ça, ce serait indécent. C’est aussi vouloir outrepasser l’omerta qui règne dans les clubs. Parce qu’aujourd’hui on donne à voir le strass et les paillettes comme à Lyon, Paris, ou Montpellier, c’est super. Mais ailleurs, ça ne se passe pas comme ça et ce ne sont pas les clubs les plus enclins à évoquer les conditions qu’ils font à leurs filles. Ce n’est pas très glorieux. Dans beaucoup de clubs, les filles sont dans des conditions abominables. Elles ne se rebellent pas car elles savent que de toute façon, elles peuvent être balayées d’un revers de main la saison suivante donc quand la place est précaire, on est prête à tout accepter pour que l’on puisse jouer. C’est triste mais c’est la vérité.

Quel regard portez-vous sur l’évolution du football féminin aujourd’hui ?

Un regard mitigé. A la fois, il y a eu des nets progrès entre le moment ou j’ai commencé le foot et aujourd’hui. Néanmoins, ce sont des progrès qui sont longs et qui ne sont pas homogènes. Les conditions sont totalement différentes. Il y a un grand écart entre Lyon et un club du bas de tableau par exemple. Donc ce sont des choses qu’il faut corriger mais qui sont uniquement dépendantes de volontés politiques. Les conditions qui sont faites aux femmes à l’OL sont uniquement le fruit d’une volonté politique du président du club, qui estime ses filles et les met dans les meilleures conditions possibles depuis des années. On est encore tributaires de cela. La plupart des clubs sont dirigés par des hommes. Les changements sont lents et en même temps assez rapides au regard de l’entrée des femmes dans le monde du foot. Le football a été interdit aux femmes durant la seconde guerre mondiale et jusqu’aux années 70. En 1970, la FFF a levé cette interdiction pour les femmes de jouer au foot. Mais j’ai tendance à croire que dans le sport, et dans le foot en général, les mentalités sont archaïques et encore plus difficiles à bouger. Donc tout ce qu’on peut constater comme discriminations dans notre société, il faut considérer que dans le football, elles sont encore plus présentes. Et qu’elles mettront encore plus de temps à bouger.

La suite de l'entretien à retrouver cette semaine sur notre site internet

Propos recueillis par François Lecorps

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